La catégorie NEET

L’acronyme NEET apparaît au Royaume-Uni durant les années 1990, « au moment où l’âge minimal d’éligibilité aux prestations de chômage est augmenté » (Longo, Gallant, 2016, p. 21). Ce changement des conditions d’accès aux droits sociaux rend invisible une partie du chômage des jeunes âgés de 16 à 18 ans qui n’apparaissent plus dans les statistiques publiques de l’État. Du point de vue de l’accès aux droits sociaux comme du point de vue des catégories de recensement de la population, les jeunes quittant précocement le système scolaire se retrouvent alors dans une forme d’entre-deux statutaire et de vide juridique. Ils sont d’abord rassemblés dans la catégorie dite Status Zer0, une qualification jugée inadéquate et stigmatisante, qui sera donc remplacée par la catégorie des NEET. Aujourd’hui, la tranche d’âge concernée s’est considérablement élargie puisque les statistiques comptabilisent en général en NEET les jeunes âgés de 15 à 29 ans ou de 15 à 24 ans. Pour les statistiques publiques, le taux de NEET est apparu comme une alternative intéressante au taux de chômage des jeunes. En effet, celui-ci ne comptabilise pas les « inactifs » et ne rend pas compte de la grande diversité des taux d’emploi des jeunes selon les pays, liée à la fois à la durée des études et à la situation sur le marché du travail. « La définition de la catégorie des NEET vise a` répondre a` l’incomplétude des indicateurs classiques en rapportant les situations de non-emploi a`l’ensemble des jeunes d’un même âge au lieu de limiter les comparaisons aux seuls jeunes actifs » (Timoteo, 2016, p. 1). Dans le cadre de la stratégie de croissance « Europe 2020 », le taux de NEET devient à l’échelle européenne un indicateur de comparaison et d’évaluation des politiques publiques d’emploi et de formation conduites par les différents États membres. Selon les sources de données, l’estimation du nombre de jeunes NEET âgés de 15 a` 29 ans en France est comprise entre 1,6 et 1,9 million, dont près de la moitié ne serait pas en recherche d’emploi. Dans cette tranche d’âge, le taux de NEET aurait légèrement baissé en France durant ces dernières années pour s’établir autour de 15 %, soit dans la moyenne des autres pays européens. Les analyses comparant les taux de NEET à l’échelle européenne distinguent quatre groupes de pays : un premier groupe qui rassemble des pays ayant des taux très faibles (Allemagne, Danemark, Finlande, Luxembourg, Pays-Bas, Royaume-Uni, Suède) ; un deuxième groupe plus hétérogène, dans lequel on trouve la France, qui rassemble des pays dont le taux est à la moyenne ou en dessous de la moyenne (France, Belgique, Chypre, République tchèque, Slovénie) ; un troisième groupe de pays qui enregistrent des taux élevés, caractérisés par une plus forte proportion de femmes, de jeunes diplômés et de personnes découragées (Bulgarie, Grèce, Hongrie, Italie, Roumanie, Slovaquie) ; enfin, un quatrième groupe de pays particulièrement touchés par la dernière crise économique qui connaissent des taux de NEET élevés et une plus forte proportion d’hommes, de jeunes diplômés et de personnes découragées (Espagne, Estonie, Irlande, Lettonie, Lituanie, Portugal). Outre cette possibilité de comparaison entre les pays, la catégorie des NEET est souvent mobilisée pour souligner les « risques de devenir NEET » et les « coûts » économiques, sociaux et politiques pour la société, à moyen et à long terme pour la société. Toutes choses égales par ailleurs, le risque de devenir NEET est plus important pour les individus peu ou pas diplômés, issus de milieux sociaux modestes, habitant des territoires ruraux, issus de l’immigration et issus de familles monoparentales. Autrement dit, ce risque renvoie à un cumul de fragilités socioéconomiques que l’on retrouve par ailleurs dans différentes analyses concernant le décrochage scolaire et le chômage des jeunes. Eurofound propose par ailleurs une estimation à moyen et à long terme du coût économique des NEET en termes de perte de revenus pour la société, de diminution des contributions sociales et fiscales et de versement d’allocations sociales. Ce coût est estimé à 153 milliards d’euros pour l’ensemble des 26 pays de l’Union européenne, soit 1,21 % du PIB. Pour la France, le coût des NEET s’élèverait à 22 milliards d’euros, soit 1,11 % du PIB national. Eurofound insiste également sur les coûts sociaux et politiques des NEET qui semblent construire un rapport plus distant aux formes instituées de la politique, marqué par une plus faible participation électorale, un plus fort désintérêt pour la politique et une plus faible confiance dans les institutions.